
Le grand ras-le-bol numérique au Cameroun : le pays suffoque mais silence radio chez les opérateurs 🇨🇲📵
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Connexions instables, forfaits qui s’évaporent, factures jugées abusives, service client fantôme… Depuis plusieurs mois, la frustration des consommateurs camerounais atteint un niveau inédit. Orange, MTN, Camtel : les plaintes explosent sans réponse claire. Une colère qui s’amplifie depuis la présidentielle du 12 octobre, marquée par une recrudescence de pannes et de ralentissements jugés suspects — perçus par certains comme stratégiques. Plus qu’un simple désagrément technique, c’est désormais un sentiment national d’exaspération et d’impuissance qui s’installe.
Plus personne n’épargne les opérateurs 📉
Dans les taxis, les bureaux, les cybercafés, sur WhatsApp ou dans les files d’attente d’agence, le sujet revient partout : « Internet ne marche plus. » Pas un quartier qui ne s’en plaigne. Le problème n’est plus marginal, il est devenu structurel. Des utilisateurs affirment payer des forfaits data qui s’évaporent en quelques heures, sans usage proportionnel. D’autres évoquent des « réseaux fantômes » : signal plein, mais impossibilité de charger une simple page web.
« On recharge 2 000 FCFA, le réseau tourne pendant à peine deux heures, puis plus rien, comme si j’avais rêvé. Ce pays est en 2025 avec un Internet de 2001. On paie, on subit. Et personne ne répond », lance Ulrich, étudiant à Maroua.
Dans les espaces de coworking, des entrepreneurs affirment devoir décaler des rendez-vous internationaux parce qu’un appel vidéo est devenu “mission impossible”. Des freelances avouent travailler la nuit uniquement car le réseau est “moins catastrophique entre minuit et 6h du matin”.
« C’est simplement aberrant et pitoyable. On perd de l’argent et personne ne s’inquiète. Ce n’est même plus de la frustration, c’est de l’humiliation. On travaille comme si on vivait en 1998. »
Un sentiment d’impunité totale 🚨
Le point le plus souvent évoqué est la disparition inexpliquée et ultra-rapide de la data. Des forfaits hebdomadaires annoncés s’épuisent, selon les usagers, en une demi-journée de simple navigation professionnelle. Ce qui choque le plus, ce n’est pas uniquement la panne, mais l’absence totale de reddition de comptes. Les forfaits sont prélevés correctement, mais les services correspondants ne suivent pas. Les abonnés dénoncent une qualité de service inversement proportionnelle au prix.
« Ils augmentent les tarifs, ils réduisent la qualité. C’est du vol organisé », accuse Guy, revendeur mobile.
La colère est renforcée par l’absence quasi totale de communication claire. Pas d’excuse officielle, pas d’explication technique. Dans les rares cas où un SMS arrive après 48 h de panne, il évoque simplement des « perturbations momentanées ».
« Le service client ? Ils copient-collent la même phrase : “Veuillez redémarrer votre téléphone et attendre quelques heures.” Ça fait trois ans qu’on redémarre et qu’on attend, en suffoquant », ironise Yasmine, stagiaire en communication.
Un ralentissement accru et suspect depuis la présidentielle 🗳️
Depuis la période électorale du 12 octobre, les témoignages évoquent une aggravation. Les ralentissements seraient plus fréquents lors de lives, de débats sur TikTok ou de partages massifs sur Facebook ou WhatsApp.
« Juste au moment où un direct devient viral, Internet se coupe. C’est systématique. On dit que c’est la fibre qui est coupée au Congo, ou un requin qui mange les câbles. On est fatigués des légendes urbaines », lâche Junior, motion designer.
Aucune preuve officielle ne confirme une régulation intentionnelle. Mais le doute est installé. Et dans un pays où la confiance numérique est déjà faible, cela suffit à créer une tension nationale
Des experts en cybersécurité interrogés évoquent deux hypothèses : une saturation technique massive due à l’explosion soudaine du trafic, ou une régulation informelle visant à ralentir la circulation virale de certains contenus. Le gouvernement, lui, n’a publié aucune communication claire à ce sujet. L’opacité alimente le doute, et le doute devient anxiété.
Une économie digitale ralentie à la source 💼
Ce ne sont plus seulement les influenceurs qui s’indignent, mais tout l’écosystème économique. Start-up tech, fintech, médias digitaux, livreurs, créateurs de contenu, indépendants, commerçants en ligne : l’économie informelle et digitale camerounaise souffre directement.
Cours privés en ligne irréguliers, cabinets d’expertise retardés, e-commerce fragilisé, ventes en direct avortées, médias obligés d’enregistrer leurs vidéos hors connexion… La productivité est à l’arrêt.
« On veut digitaliser le Cameroun, mais on nous coupe les jambes au niveau du réseau. Même accéder à son compte bancaire est devenu une bataille. Et pourtant, on paie, toujours à l’heure », martèle un cadre.
Des comptables racontent devoir revenir aux clés USB pour transférer des documents urgents. Des agences immobilières expliquent perdre des clients à l’étranger. Tout ce qui exige réactivité, envoi de fichiers lourds ou live-stream devient un combat quotidien.
Malgré tout, les opérateurs continuent de lancer des campagnes marketing massives pour promouvoir la 5G, les “forfaits premium” ou les “pass professionnels” — totalement déconnectés de la réalité des utilisateurs.
Une crise silencieuse… mais explosive 💣
Ce qui choque le plus, c’est le silence. Les opérateurs ne reconnaissent pas officiellement la crise. L’ART ne publie pas d’audit public, mais les factures continuent d’arriver à temps.
« On a l’impression qu’ils savent qu’on n’a pas le choix. Alors ils se permettent tout. Il faut bien qu’un concurrent arrive, qu’on puisse tous se le permettre, et les dégager », résume un abonné.
Cette panne permanente est devenue une norme tolérée, presque institutionnalisée. Et si rien ne change dans les semaines à venir, la colère qui gronde ne sera peut-être plus exprimée sur Facebook ou WhatsApp, mais autrement : dans la rue, ou pire, dans la manière dont les citoyens cesseront de croire à l’idée même d’un futur digital camerounais. Car un État peut survivre à des coupures de courant… mais pas longtemps à la coupure de confiance.
👉🏾 Et vous — est-ce que votre connexion aussi devient inutilisable au moment où vous en avez le plus besoin ? Que vivez-vous concrètement au quotidien avec Internet au Cameroun ?
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