Image générée avec une IA / Image generated with AI
ActualitésRéseaux sociauxSociété

Du silence aux hashtags : Au Cameroun, les réseaux sociaux brisent l’omerta autour des abus sexuels 🇨🇲📱

Click here to read in English

Pendant longtemps, au Cameroun, les affaires d’abus sexuels restaient confinées dans des cercles privés, étouffées par la peur, la honte ou la complicité du silence. Mais en janvier 2024, l’affaire Hervé Bopda a fait voler en éclats ce mur, propulsée par la force des réseaux sociaux. Ce qui n’était qu’un témoignage isolé s’est transformé en onde de choc nationale, révélant l’émergence d’un véritable mouvement #MeToo local, comme en France en 2017.

Le numérique comme mégaphone 📢

Tout commence par une publication du lanceur d’alerte N’zui Manto sur Facebook, suivie d’un flot de captures d’écran, de messages vocaux et de témoignages anonymes diffusés sur Twitter (X) et Instagram. Très vite, le nom d’Hervé Bopda, homme d’affaires et figure mondaine, est associé à des accusations d’agressions sexuelles et de comportements prédateurs. L’histoire quitte alors le post initial pour envahir les timelines.

Les victimes racontent des scènes similaires, certaines décrivant aussi les menaces reçues après avoir refusé ses avances.

« C’était la première fois que je voyais autant de femmes oser parler. Même si c’était dangereux, elles se sont soutenues. Dommage que ce soit resté anonyme », confie Élodie, étudiante rencontrée dans un cybercafé.

Très vite, un hashtag s’impose, fédérant l’indignation et révélant des récits longtemps restés dans l’ombre. En quelques jours, le nom de Bopda devient viral, obligeant les médias traditionnels et même les autorités à réagir.

« Sans Twitter et Facebook, on n’aurait jamais su ce que cet homme faisait. Les victimes avaient peur de parler, mais une fois que les témoignages ont circulé, d’autres ont trouvé la force de s’exprimer. C’est ça, la puissance des réseaux sociaux », explique Odeline, informaticienne.

#StopBopda et un #MeToo à la camerounaise ✊

En moins de 48 heures, le hashtag #StopBopda atteint les tendances nationales. Les stories Instagram affichent des messages de soutien mais aussi des avertissements : « Ne sortez pas seules », « Attention à vos rendez-vous ».

Sur Twitter, des threads compilent minutieusement les faits : dates, lieux, captures d’écran. Le travail ressemble à une enquête journalistique participative, menée entièrement en ligne. Dans les rues de Yaoundé, jusque dans les taxis et les marchés, on ne parle que de l’affaire.

« Ce n’est pas qu’un scandale, c’est un tournant. Maintenant, tout prédateur sait qu’il peut être démasqué à tout moment. Les smartphones sont devenus nos caméras de surveillance citoyennes », lâche un jeune vendeur de cartes SIM.

Si le mouvement #MeToo a pris racine ailleurs il y a plusieurs années, c’est l’affaire Bopda qui a montré qu’au Cameroun aussi, le numérique pouvait briser le silence. Mais ici, le risque social et juridique est plus élevé pour celles qui dénoncent. Car les plateformes sont autant un lieu de soutien qu’un terrain de cyberharcèlement.

Quand le numérique pousse à l’action🚨

Plus de 70 témoignages anonymes comportant des accusations d’agressions sexuelles se sont relayés sur les réseaux sociaux. La mobilisation gagne alors artistes, sportifs et influenceurs suivis à travers le continent africain et au-delà.

« Il faut dire la vérité : si l’affaire était restée dans les tribunaux, on aurait eu un non-lieu. Mais avec la pression des internautes, avec le hashtag qui a fait le tour du monde, les autorités ont été obligées de bouger, même si cela n’a pas conduit à ce qu’il paie pour ses supposés actes », raconte Nathalie, entrepreneure.

Fin janvier 2024, la pression aboutit à son interpellation. Hervé Bopda est alors présenté par la CRTV comme « un suspect soupçonné d’avoir violé ou agressé sexuellement un très grand nombre de jeunes filles ». Le gouvernement camerounais réagit aussi, par la voix de la ministre de la Promotion de la Femme et de la Famille, Marie Thérèse Abena Ondoa, qui se félicite de « la saisine des autorités judiciaires compétentes en vue d’établir la matérialité des faits ».

Les droits du coupable ⚖️

Cette pression populaire pousse l’Ordre des Avocats et la Commission des Droits de l’Homme du Cameroun à réclamer l’ouverture d’une enquête, estimant qu’Hervé Bopda court un risque de vindicte populaire. La militante Bergeline Domou signe même une lettre ouverte aux autorités pour exiger son interpellation et lui éviter tout danger.

Le barreau appelle à « l’ouverture d’une enquête » et invite le parquet à traduire l’auteur présumé dans le respect d’une procédure équitable. Hervé Bopda est alors inculpé pour « port illégal d’arme », « escroquerie », « menace sous condition » et « harcèlement sexuel ».

Après une seconde vague de plaintes, il est aussi poursuivi pour « viols en réunion », « tentative d’enlèvement sous la menace d’une arme » et « agressions diverses et menaces ». Le 29 février 2024, Hervé Bopda est placé en détention provisoire à Douala. Le 19 août 2024, il est libéré sous caution.

Le web comme terrain de justice sociale 🌍

L’affaire Hervé Bopda n’est pas qu’un scandale : c’est un miroir tendu à la société camerounaise. Elle révèle la puissance explosive des réseaux sociaux, capables de transformer des murmures en cris collectifs et d’imposer des débats longtemps refoulés.

Dans un pays où la justice est lente et parfois partiale, le numérique devient le nouveau tribunal de l’opinion publique. Mais ce tribunal est aussi sans appel : il ne pardonne pas l’omerta, il amplifie les voix qu’on voulait taire et il force la société à affronter ses blessures

Le Cameroun est ainsi entré dans une ère où un simple hashtag peut renverser des réputations et changer le cours d’une histoire. Dans ce Cameroun numérique, chaque clic peut désormais être une preuve… ou une condamnation.

 

À vos avis !!!
👉 Pensez-vous que les réseaux sociaux doivent jouer ce rôle de “tribunal populaire” dans des affaires aussi sensibles ? Partagez vos réflexions en commentaires


📱 Retrouvez notre actu chaque jour sur WhatsApp, directement dans l’onglet “Actus” en vous abonnant à notre chaîne en cliquant ici ➡️ Lien chaîne WhatsApp TechGriot  😉

Qu'en avez-vous pensé?

Excité
0
Joyeux
0
Je suis fan
0
Je me questionne
1
Bof
0

Vous pourriez aussi aimer

Laisser une réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Plus dans:Actualités